Anti manuel du dialogue 2
Monsieur Duduche est un vrai collègue. Ses pairs l’ADORENT. Il ne se lasse pas de raconter à sa femme que « vraiment, ils sont à mon écoute. Tu verrais comment le silence se fait quand je prends la parole en comité de direction ; leurs visages impassibles transpirent la concentration. Et quand nous avons des réunions entre experts » - car monsieur Duduche met un point d’honneur à avoir des interactions régulières avec ses collègues… contrairement à d’autres - « ils sortent de là reconnaissants, avec une to do list, tu comprends, ils se sentent plus utiles ».
Monsieur Duduche se plaît à dire que tout tient à des attitudes favorisant la collégialité, la coopération et l’intelligence collective. Il se tient à des règles qu’il partage sans compter :
Considérer les autres comme une extension de soi. Certes avec d’autres expertises, mais étant avant tout comme un outil à sa main. Pourquoi ? Votre pair gagne du temps. Il sait exactement ce qu’il a à faire. Les relations entre collègues n’en sont que meilleures, car chacun est « instrumentalisable » par l’autre. Et, c’est bien connu, les émotions perturbent tout. Il faut rester rationnel ; et si chacun est pour l’autre un objet, tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes des non-sujets (surtout si en plus, ils parlent très peu !)
Briller en comité de direction et mettre dans l’ombre tout ce qui pourrait fâcher le boss et les collègues. Pourquoi ? Mettre les non-dits au milieu de la table, c’est assurément l’ouverture de conflits. Et personne ne sera étonné de lire que les conflits ne sont pas féconds. C’est donc pour soi juste une prise de risque, celui d’être identifié comme le vilain petit canard qui joue cartes sur table pendant que les autres font les paons.
Mépriser ses pairs (le plus discrètement possible) parce qu’ils ne sont pas à la hauteur, et avec délicatesse laisser entendre à qui de droit qu’il y a un doute sur leurs compétences. Pourquoi ? S'il est de votre responsabilité d'assurer le développement de vos collaborateurs, il est par contre de votre devoir de critiquer vos collègues jusqu’à ce que mort professionnelle s’ensuive. Cela permet des relations d’égalité ; tout le monde critiquant tout le monde. A partir de là, toutes les discussions sont ouvertes.
Organiser des triangles infernaux. En toute occasion, à deux, s’allier contre un troisième qui n’est pas là et dire du mal de lui. Pourquoi ? Parce que les autres auront progressivement peur d’être la victime et préfèreront que vous soyez leur sauveur, plutôt que leur bourreau. Les conversations de ce type sont fertiles en commentaires sur les non-performances et les incompétences d’autrui. Le but est clairement d’apporter une analyse réaliste sur les points faibles de chacun. C’est bien connu, se préoccuper des talents de ses collègues n’apporte rien.
Anti manuel du dialogue 2 : Pour bien dialoguer, considérer l’autre comme un sujet parlant et créateur c’est très très dangereux.